Etude d'une dissertation rédigée : retrouver le plan détaillé
     Vous expliquerez comment l'investissement est source de croissance économique.

 
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 INTRODUCTION : 2001-2003 ont été en Europe des années de récession. Le chômage s'est accru, les inégalités ont augmenté. Il serait donc souhaitable que la croissance,c'est-à-dire de l'augmentation durable et auto-entretenue de la production sur longue période, reprenne. Pour les économistes libéraux, l'investissement est un élément essentiel de la croissance économique. Le chancellier allemand Helmut Schmidt, indiquait cette importance dans sa célèbre phrase : "l'investissement d'aujourd'hui fait la production de demain, la production de demain, l'emploi d'après-demain". Peut-on vérifier ce raisonnement ? Comment l'investissement, c'est-à-dire l'augmentation du capital fixe productif, conduit-il à une hausse de la production ?
Les économistes keynésiens insiste sur l'effet de demande : l'investissement crée une demande pour laquelle, sous certaines conditions, les entreprises vont augmenter la production. Les économiste libéraux, eux, insistent sur l'effet d'offre : l'investissement permet de produire plus et mieux, la production peut donc être augmentée.


L'investissement augmente la demande : directement celle de biens de production, indirectement aussi celle de biens de consommation, mais seulement sous certaines conditions.

L'investissement est l'achat de biens d'équipement et de bâtiments qui serviront à la production et donc augmenteront le capital fixe des entreprises et des administrations. Ces achats constituent une demande pour les industries fabriquant ces biens (document 1). Par exemple, pour se moderniser, lorsque une entreprise automobile achète des machines plus modernes, elle adresse une demande aux fabriquants de machines qui augmentent leur production pour la satisfaire.
Cet effet direct de l'investissement sur la demande est renforcé par un effet indirect : pour produire les machines ou le matériel, des travailleurs sont nécessaires et il faut les rémunérer. Prenons un exemple, un investissement de 100 millions d'euros est réalisé. La masse salariale (les salaires distribués) augmente donc de 100 millions d'euros, une partie de ces salaires est épargnée et sort du circuit économique, l'autre est consommée, par exemple, 80 millions d'euros si la propension marginale à consommer est de 0,8. Cette consommation est une augmentation de la demande de 80 millions. Pour répondre à cette demande, les entreprises produisent 80 millions de marchandises et, pour cela, distribuent de nouveaux salaires égaux à 80 millions, dont une partie est épargnée et l'autre, 64 millions, consommée... au final, on obtiendrait une hausse totale de la production de 500 millions d'euros pour un investissement initial de 100 : l'investissement multiplie la production, c'est pourquoi ce mécanisme est appelé le mutiplicateur par Keynes
(document 1). Il est utilisé dans les politiques de relance.
Celles-ci visent à augmenter la croissance pour créer des emplois en période de crise : par des investissements autonomes, financés par création monétaire et non par les impôts, l'Etat entraîne une hausse des revenus qui augmentera la consommation et donc la demande. Les entreprises se remettront à produire et la croissance repartira, ce qui permettra de supprimer le déficit public par de meilleures rentrées fiscales.

Un autre effet indirect de l'investissement, est l'apparition de gains de productivité.
Les gains de productivité sont l'augmentation de la production par travailleur (la productivité du travail) ou par unité de capital utilisée (productivité du capital). (documents 4 et 6) Ils sont souvent le but de l'investissement : produire la même chose en utilisant moins de facteurs de production. L'augmentation de la productivité peut être répartie de différentes manières dont toutes n'ont pas les mêmes effets économiques. Pour que la demande de consommation progresse, les salariés ou les consommateurs doivent profiter de ces gains : si l'entreprise augmente les salaires, la demande de consommation progressera (pas forcément celle de l'entreprise concernée mais celle globale). Ou l'entreprise peut baisser les prix : l'entreprise plus concurrentielle peut vendre plus dans le pays ou à l'exportation, et, si la demande est élastique, les consommateurs achèteront plus de ce produit.
Si les gains de productivité vont aux profits, ils favoriseront la demande de biens d'équipement, uniquement si l'entreprise finance de nouveaux investissements. S'ils vont aux actionnaires qui placent les dividendes obtenus et ne les consomment pas, la demande ne progressera pas.
L'augmentation de la demande favorise en principe la croissance : les entreprises doivent produire pour y répondre. Cependant, ce mécanisme a certaines limites.
Les premières conditions ont été étudiées par Keynes lui-même : l'absence de stocks est nécessaire. Sinon, une augmentation de la production ne sera pas nécessaire. Cette condition est aujourd'hui fréquemment réalisée du fait du "juste-à-temps", les entreprises produisent sans stock pour diminuer les coûts. L'investissement doit être nouveau ("autonome"), il ne doit pas entraîner la diminution d'un autre investissement. Ceci suppose que les politiques de relance soient financées par création monétaire et non par les impôts qui réduisent la demande privée.
L'ouverture extérieure limite les politiques de relance. Si l'investissement conduit à l'achat de biens d'équipement dans d'autres pays, ou que les consommateurs préfèrent les produits étrangers, ce sont les importations qui progressent, la relance n'a pas lieu dans le pays mais dans les pays exportateurs. Le pays ne peut donc poursuivre une telle politique seul : c'est la "contrainte extérieure".

L'investissement favorise donc la croissance parce qu'il augmente la demande, directement par la hausse de la production de biens d'équipement, et indirectement par un effet de revenu : il hausse la production de biens de consommation. Cependant, cet effet positif peut ne pas avoir lieu si les entreprises nationales ont des stocks ou si elles manquent de compétitivité.
Or, c'est un des buts de l'investissement d'améliorer les entreprises face à la concurrence extérieure : l'investissement a un effet sur l'offre.

On distingue traditionnellement l'investissement de renouvellement qui remplace le capital fixe usé ou obsolète, l'investissement de capacité qui augmente les possibilités de production, et celui de productivité qui modifie la production par travailleur. Le simple remplacement ne nous intéresse pas car il n'augmente pas la production (il la maintient), l'augmentation de la capacité de production est, par contre, une action directe positive pour la croissance et l'investissement de productivité a un effet indirect.
Lorsque l'entreprise investit pour augmenter ses capacités de production, elle favorise directement la croissance puisqu'elle pourra produire plus
(document 1). Notons, cependant, que cela peut correspondre à des situations assez différentes.
L'entreprise qui crée un nouveau produit doit mettre en place les équipements nécessaires. Les téléphones portables ont, dans les années récentes, été en ce sens facteur de croissance. L'augmentation rapide des taux d'équipement continue de rendre nécessaire de nouvelles capacités de production (cela jusqu'au point de saturation).
L'amélioration d'un produit, pour l'adapter à la demande, nécessite également des investissements matériels mais l'entreprise espère ainsi vendre en plus grande quantité, notamment, en augmentant sa part de marché (le pourcentage des ventes totales d'un produit réalisé par une entreprise). Les nouveaux modèles automobiles incluent par exemple de plus en plus souvent la climatisation pour satisfaire les clients et les attirer.
Enfin, les entreprises peuvent investir pour réduire les délais de fabrication grâce à des machines plus performantes ou par une meilleure organisation du travail.

A cet effet direct d'augmentation des capacités de production s'ajoute un effet indirect de modification de l'offre d'une part parce que le progrès technique s'intègre dans les nouveaux équipements, d'autre part parce que l'investissement immatériel ou public modifient les conditions générales de la production d'un pays.
Schumpeter a expliqué les cycles longs de Kondratief par le progrès technique (document 4). Or c'est l'investissement qui permet d'intégrer dans les équipements les innovations, plus les entreprises investissent, plus elles intègrent dans le nouveau capital les découvertes. Le lien progrès technique - croissance n'est pas évident à démontrer car la mesure du premier est difficile. Les phases de forte croissance correspondent cependant à de forts gains de productivité, ce que permet le progrès technique. Les innovations apparaissent par grappes : un entrepreneur tente une innovation, si elle réussit, elle est copiée par les autres et elle se généralise. On peut le voir par exemple avec la généralisation des micro-ordinateurs dans les entreprises pour le traitement de texte, la comptabilité, la tenue des stocks et même aujourd'hui les commandes dans les restaurants... Ces nouveaux équipements sont plus productifs ou améliorent la qualité sinon ils ne seraient pas utilisés: l'entreprise ne choisit de nouvelles machines que si le bénéfice qu'elles permettront est plus élevé que celui des anciennes.
L'investissement a souvent lieu pour réduire les coûts unitaires de l'entreprise (le coût de production d'un produit) (document 1 et 6). Trois types de coûts sont importants. Premièrement, la diminution du coût salarial passe souvent par des combinaisons de facteur de production de plus en plus capitalistiques, les hommes sont remplacés par des machines lorsque celles-ci reviennent moins cher. Deuxièmement, les matières premières sont économisées en utilisant des matières synthétiques moins coûteuses (par exemple, le caoutchouc) ou avec des machines qui font moins de rebus (la découpe des tissus programmée par ordinateur le permet). Troisièmement, les dépenses d'énergie sont un coût élevé, en particulier quand le prix du pétrole grimpe. Les progrès dans les machines elles-mêmes et la protection des déperditions d'énergie vise à les réduire.
Ces réductions de coûts permettent aux entreprises de diminuer leur prix et de devenir plus compétitives : elles supportent mieux la concurrence, peuvent accroître leurs parts de marché et exporter.Cette amélioration de l'offre est donc facteur de croissance.
Un exemple actuel de l'importance du progrès technique nous est donné par le nouvelles technologies de l'information et la communication (NTIC). Le document 3 montre une corrélation statistique entre l'importance des dépenses d'investissement en NTIC dans l'investissement total et la croissance (document 3) :
entre 1970 et 1980, le taux de croissance américain était égal à 0,98 fois celui français : il était légèrement plus faible. Or, l'investissement en NTIC était déjà un peu plus élevé par rapport à l'investissement total puisqu'il représentait aux Etats-Unis dans le secteur privé 16,9 % de l'investissement total, et en France dans l'ensemble de l'économie 12,2 %. L'effet de l'investissement en NTIC n'était donc pas encore positif. L'économiste Solow a parlé du "paradoxe de la productivité" en NTIC : malgré un investissement considérable, les gains de productivité n'étaient pas visibles dans les statistiques des années 1970-80. On peut dire qu'il a fallu du temps pour que ces investissements deviennent efficaces. Mais, dès 1980-1990, l'écart entre la croissance américaine (forte) et celle française (faible) s'accentue. Sur la période 1990-1998, les EU ont une croissance 2,08 fois plus forte que la France. Les NTIC ont, d'après de nombreux économistes, joué un rôle.
En effet, deux phénomènes semblent importants (document 2) pour la croissance américaine des années 1990 : une plus forte utilisation du facteur travail, et une augmentation des gains de productivité. Cette hausse de la productivité est liée au progrès technique et notamment dans les NTIC. La "loi de Moore" mise en évidence en 1965 par Gordon Morre, cofondateur d'Intel, met en évidence l'importance des progrès accomplis : le nombre de transistors par puce, et donc les capacités de calcul, doublent tous les 18 mois. Les ordinateurs sont donc de moins en moins chers et de plus en plus performants. Leur utilisation par toutes les entreprises devient possible et nécessaire même si cela implique de nouvelles organisations du travail et de nouvelles compétences pour les travailleurs. Les enquêtes semblent prouver que les entreprises françaises qui utilisent l'informatique et, éventuellement, internet connaissent une augmentation de leur chiffre d'affaire, un taux de marge et des exportations plus élevées que les autres. Ceci va bien dans le sens que l'investissement favorise la croissance, cependant la démonstration est constestable : le document 3 compare le secteur privé américain à l'ensemble de l'économie française, or les innovations se développent plus rapidement deans le secteur privé. De même lorsque l'on compare les entreprises qui utilisent l'informatique aux autres, n'oublie-t-on pas le dynamisme des chefs d'entreprise qui est peut-être le facteur essentiel plus que l'utilisation de l'informatique ?
Il n'en reste pas moins un effet positif des nouveaux équipements sur la croissance. Les découvertes qu'ils incluent nécessitent des investissements immatériels en particulier dans la recherche ou le marketing (document 4).
Le conflit de chercheurs au début de l'année 2004 a rappelé son importance : les entreprises comme les états qui ne raisonneraient qu'à court terme en investissant uniquement dans le matériel iraient à leur perte car d'autres feraient des innovations. Il est nécessaire de faire de la recherche fondamentale avant de pouvoir faire celle appliquée. C'est un détour obligatoire. Les dépenses commerciales sont de même type : il ne suffit pas de faire un bon produit, encore faut-il le faire connaître.
Un dernier type d'investissement se rapproche de celui immatériel, c'est celui public. A court terme, il peut paraître peu rentable mais, à long terme il modifie les conditions des entreprises et détermine, en partie leur productivité. En France, sur 100 euros investis en France en 2000, 15 le sont par l'Etat (document 5). Après une hausse dans les années 1980, cette part s'est légèrement réduite après 1993 avec les problèmes budgétaires.
Le rôle de l'Etat s'est développé après 1945, et il joue un rôle important aujourd'hui tant pour la recherche que pour les infrastructures ou la formation des jeunes. Dans une économie internationalisée, on pourrait penser que ces dépenses, financées par les prélèvements obligatoires accroissent les coûts des entreprises et diminuent donc leur compétitivité. Ce serait une analyse trop rapide. Certes il y a des coûts mais aussi des avantages. Les effets externes positifs de ces dépenses ne sont pas contestés : l'éducation, par exemple, bénéficie à l'étudiant qui pourra obtenir un travail plus intéressant et mieux payé, mais elle bénéficie aussi à l'entreprise qui utilisera un salarié compétent, capable d'utiliser les nouvelles technologies, car il est évident qu'il ne suffit pas d'avoir du matériel moderne, encore faut-il savoir l'utiliser. Le financement public permet que tous les jeunes, quelques soient les revenus de leurs parents, puissent être formés. Il favorise l'augmentation des qualifications qui favorise la modernisation des entreprises, et donc leur compétitivité qui favorise ensuite la croissance. Cet effet positif n'empêche évidemment pas de réfléchir sur l'efficacité des dépenses en les comparant à leur coût.


En conclusion, l'investissement favorise la croissance par un effet de demande et par un effet d'offre. La demande progresse par l'achat de nouveau capital fixe, mais aussi, indirectement, par un effet multiplicateur et par la répartition des gains de productivité en faveur du pouvoir d'achat. Cependant, cet effet nécessite le besoin de produire, donc l'absence de stocks, et est limité par l'ouverture extérieure des économies contemporaines : il est nécessaire que les entreprises soient compétitives. L'effet d'offre, justement, favorise la compétitivité. L'investissement peut directement augmenter la production ou indirectement l'améliorer en intégrant le progrès technique et en modifiant, à long terme, les conditions de production qui incluent les infrastructures et la formation. L'investissement, privé et public, est donc favorable à la croissance.
La France saura-t-elle retrouver un niveau suffisant d'investissement pour impulser une croissance forte créatrice d'emplois ?



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